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Le Djaraf” distribue la parole nous sommes en plein dans la société traditionnelle
Un jeune malade pleure car il veut qu’on lui coupe les jambes du professeur pour son propre plaisir
Le penc est un moment exceptionnel où la parole est donnée à tout le monde
Les malades livrent leurs angoisses, leurs désirs intérieurs refoulés, c’est un moment exceptionnel où la parole n’est pas confisquée
Le malade peut délirer en toute démocratie
le penc est un moment de la libération de la parole.
Les angoisses coulent comme l’eau de roche
Les panneaux de signalisation s’écroulent, sens interdit, virage à gauche ou à droite
On peut conduire sa voiture cérébrale en toute impunité
Le penc est un moment de partage où les angoisses sont partagées et dédramatisées
Le penc est une institution du fauteuil de la psychanalyse
Oui la gendarmerie de la société disparaît
Nous devenons des enfants avec des balançoires

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Entendre des voix et avoir des hallucinations sont les échos du royaume de la folie
La schizophrénie est un ballet de sons, une chorégraphie de nos sens intérieurs Une pluie fine et torrentielle de notre énergie
Une fois durant la réunion de notre assemblée sous la direction du professeur Henry Collomb à Fann un patient a traité ses parents de cannibales
Des journalistes américains étaient surexcités et commençaient à filmer
J’avais pris la parole pour dire que les Américains avaient commis un génocide en larguant des bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki
On me fit un électrochoc et j’avais fait pipi
Pour les psychiatres je dérangeais la réunion qui avait une âme exotique : l’anthropophagie
Je me souviens d’une séance d’une thérapie collective pour aider un patient plongé dans un grand silence qui avait commis un crime
On mit en scène le meurtre le patient cria “c’est moi qui l’ai tué” il était débloqué et retrouva la parole

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Entendre des voix venant d’outre-tombe et être terrorisé par mille et une images c’est le défi du schizophrène dans sa vie quotidienne et dans sa thérapie quotidienne devoir prendre des médicaments à vie tel est le camp de concentration de cette maladie
Entendre des sons c’est le début de la grossesse et de l’accouchement d’un poème
La schizophrénie est une muse instable dont l’acte amoureux est éphémère mais c’est à ce moment qu’il faut écrire son délire
Être assailli par mille images et caresser l’irréel dans sa propre chair est douloureusement magique
La schizophrénie est une île sans chaloupe mais le poète est doté d’un bateau magique d’images folles échappant aux psychiatres et ses drogues douces et violentes
Le Nozinan est une lame tranchante du cerveau et un camp de concentration du corps
J’ai souffert des cellules de ma thérapie
La poésie fut ma récréation magique
Mes baignades dans l’océan de l’écriture furent des noyades dans la mer de la magie des étoiles
La psychiatrie est un drame car ces ciseaux n’hésitent pas à “charcuter” les ailes des délires d’un prophète, d’un poète ou d’un peintre, oui tout être issu du royaume du délire
La poésie caresse les temples du royaume de la magie

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La danse-transe est l’invitation du corps à entrer en connexion avec les esprits pour écrire avec les ordinateurs de la chair des e-mails provenant des dieux du désordre mental
Le corps parle, pique des crises d’épilepsie et en vient aux confidences dans le temple de l’âme du guérisseur
Le guérisseur ou chaman n’est pas exclu du processus des examens du patient
Le professeur Collomb avait choisi le mariage de la médecine traditionnelle et moderne pour faire venir au monde une rencontre féconde des cultures
Cheikh Hamidou Kane de dire “je ne suis pas un des pays dialobé distinct face à un Occident distinct appréciant d’une tête froide ce que je puis lui prendre et ce qu’il faut que je lui laisse en contrepartie je suis devenu les deux
Il n’y a pas une tête lucide entre deux termes d’un même choix…”
La danse-transe l’écho des sons ambiants caressant l’âme qui n’est qu’un autre nom du corps
On m’avait interdit un night club car le propriétaire avait peur que je détruise les lampes dont le prix était excessif
La danse-transe est l’âme du Deup de l’ethnie des pêcheurs lébous

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Le professeur Collomb s’est ouvert à la culture de ses patients pour mieux comprendre leurs bouffées délirantes
En interrogeant l’inconscient collectif il a découvert une mine d’or
Nous n’avons pas les mêmes représentations culturelles de la folie à l’échelle mondiale
Les “lébous” pêcheurs de Dakar ont une autre représentation de la maladie mentale
Le malade est interpellé par les esprits ou rab qui l’empêchent d’être dans la quiétude
Les devins vont se charger d’une mission de transmettre à la société le sacrifice du patient
En général il s’agit d’un bœuf immolé au seuil de l’océan, puis tué, puis la foule entame des danse-transes pour réconcilier à jamais le malade et ses esprits ou “rab”
Les représentations culturelles sont l’âme du Moi, du patient, c’est le secret de la collaboration du professeur Collomb et des guérisseurs
Le professeur Collomb n’était pas un porteur de cravate assis confortablement dans son bureau. Il allait en Casamance dans son petit avion pour écouter et entendre et comprendre les secrets de toutes les cultures
Sa double culture c’est l’autre moi-même. C’était le secret de l’art de sa thérapie
Pour moi rentre un hommage au professeur Collomb est un sacerdoce

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Papisto Boy retrace l’histoire du Sénégal et du monde par des dessins subtils à dessein pour caresser l’inconscient collectif de l’Afrique et du monde
Les personnages charismatiques du pays et de l’humanité se baladent dans les longs jardins des paysages de la mémoire terrifiante de Papisto Boy
De Gaulle, Gandhi, Bob Marley, Cheikh Anta Diop, Moussa Ngom, Prosper Niang du groupe Xalam forment tout un chapelet de personnages issus de l’histoire récente de l’humanité
Papisto Boy n’oublie pas l’écrivain Fichte et le couple célèbre Kennedy
Les délires de Papisto Boy sont un ballet oui une chorégraphie de personnages laissant leur empreinte digitale sur la carte d’identité de l’humanité
Papisto Boy réconcilie dans son œuvre des pans de l’histoire de l’humanité
Papisto Boy est un psychanalyste mettant sur le divan de son inconscient des personnages parfois irréconciliables en délirant sur leurs différences
Les fresques de Papisto Boy sont la carte d’identité et le passeport pour circuler dans le pays et pour pénétrer dans les aéroports et les douanes en narguant les flics
Papisto Boy meurt dans le dénuement en nous offrant des fresques mettant en exergue nos complémentarités et nos différences